vendredi 12 mars 2010

De Whitehorse à Rose Lake via Mud Lake...

... C’est finalement dans la nuit, toutes affaires réunies et dispatchées dans les traîneaux, que les quatre attelages s’élancent en direction de la « Cabane à Vanier ». Dans la mesure où nous n’avons pas trouvé le temps d’initier Françoise aux rudiments de la conduite des sleds, et que la piste démarrant chez Pierre (notre guide) est très raide et se jette brutalement sur la route en contrebas, elle a bénéficié d’un trajet en motoneige avec Wendy jusqu’au début de Fish lake. C’est là que Françoise a enfin pu goûter à la première glisse de son traîneau entraîné par Kluane, Cousteau et Polar à la lumière des lampes frontales.



Etrange manège, que ces attelages glissant dans la nuit, où l’on entend que le halètement des chiens et les crissements des traineaux sur la neige gelée sous la lumière naissante d’une aurore boréale.

Arrivons à la cabane bien après le milieu de la nuit, mais le feu ronronne déjà dans le poêle, Pierre et Wendy étant passés par là et ayant déposé une grande partie de notre chargement.



Que de découvertes : la cabane mythique devenant réalité, la mise en place des « stake out » pour y attacher les chiens, le premier repas de l’expédition et l’installation pour la nuit dans le lit royal avec une interrogation qui taraudera Françoise tout au long du périple : « aurais-je suffisamment chaud ? ».


 
Avant de se coucher, Matthieu installe sa dernière acquisition, à savoir un thermomètre qui sera seul juge de la question. A nouveau il nous appelle pour immortaliser l’aurore boréale, mais le temps d’ajuster nos appareils photos … il est trop tard.

Les fenêtres financées lors du précédent voyage et installées par Adrien et Matthieu sont toujours en place. Mais où sont passées les souris et autres habitants légitimes de ce lieu ? En revanche que de boites et bouteilles vides. Pourquoi chacun se sent-il obligé de marquer ainsi son territoire ? Un grand nettoyage s’impose avant le printemps, tant que le lac est encore gelé et que le transport à 32 pattes (huit chiens) fonctionne !


16 février :

La nuit a été calme et au petit matin nous retrouvons les chiens sous une fine pellicule de neige fraîche.



Après avoir nourri les chiens, Matthieu nous confectionne des pancakes sur son réchaud à pétrole (attention : non initiés s’abstenir) qui fonctionne quelque soit la température. Enrichis de Philadelphia cream cheese au saumon, de sirop d’érable, de miel ou de Nutella, nous n’avons aucun mal à succomber à la tentation. Par ailleurs, il nous faut tenir jusqu’au dîner … car le déjeuner sera frugal.




Pierre, notre guide nous rejoint avec son traineau et nous chargeons les quatre attelages du matériel et des vivres, y compris ceux des chiens, pour quatre jours et trois nuits.


Le départ de la cabane à Vanier se faisant en descente vertigineuse, quelques précautions sont nécessaires. Seuls deux chiens par traîneau sont attachés par leur harnais afin de limiter la traction. Malgré tout, Matthieu, premier à partir s’explose littéralement, sous les yeux de sa mère, contre un jeune arbre d’une dizaine de cm de diamètre qui casse sous l’effet du choc (sinistre bruit). Nous constaterons bien plus tard qu’un des deux patins du traîneau a subit le même sort … mais la construction solide (type Renner) a permis de limiter les dégâts. Pierre nous aide, Françoise et Marc à franchir la partie la plus raide et nous nous retrouvons rapidement sur le lac pour la grande aventure.

 

Nous gravissons des pentes douces en direction de Ibex Mountain, laissant Fish Lake dans notre dos et essuyant de temps en temps des bourrasques de vent et de neige qui nous rappellent que nous sommes bien en hiver.







Après quelques heures de glisse à travers la montagne nous arrivons à Mud Lake ! Il fait froid, gris et humide, sommes fatigués et nous découvrons notre… hôtel 4 étoiles.




Différentes tâches s’imposent :
- installer les chiens pour la nuit. Pas si facile, il n’y a pas un arbre pour fixer les stake out et seuls quelques buissons offrent une résistance suffisante. Fort heureusement une épave de motoneige servira de point d’ancrage,

- prendre un solide goûter pour tenir le choc (petits pains au cheddar fourrés de lard et de saucisses grillés),




- chercher du bois : Pierre est convaincu qu’il y en a sous la neige et commence à sonder méticuleusement à l’image des sauveteurs suite à une avalanche. La tentative va s’avérer infructueuse et il faudra se contenter d’une souche et des quelques rondins trouvés sous la table, finalement suffisants. Merci donc à ceux qui nous ont précédés.



- préparer de l’eau pour les chiens puis pour les humains, en cherchant des blocs de neige compacte, aussi propre que possible qu’il faudra patiemment faire fondre. Un conseil : never eat yellow snow !



 
- nourrir les chiens avec une soupe de croquettes et veiller à ce que chacun ait eu la part qui correspond à son appétit,

- repérer nos toilettes naturelles où il conviendra de brûler tout papier et d’enfouir nos traces.



Enfin, nous pouvons songer à préparer notre repas. Il est 20h et nous sommes arrivés à 16h !

Au menu, potage de champignons, steaks de bœuf de l’Alberta (excellent) et beans au sirop d’érable (avis partagés), fromages français et oranges.



Pour la nuit, il n’y a de la place que pour deux personnes dans la cabane. Pierre s’installe dans son traîneau, Matthieu se confectionne un abri contre le vent, à l’aide d’une planche fixée entre deux traîneaux. Françoise et Marc s’installent sur le plancher de la cabane en observant avec inquiétude les gouttes qui tombent de toute part du plafond. La chaleur fait fondre la neige et la toiture n’est pas étanche …



17 février :

Fort heureusement une fois le poêle éteint, le froid reprend ses droits et les gouttes se sont figées.







La nuit fut apparemment bonne à l’extérieur comme à l’intérieur de notre château. Il convient à présent de nourrir les chiens et de se confectionner un solide petit déjeuner. Au menu : bannocks (spécialité locale adaptée par Matthieu) aux pommes et à la cannelle.








Le départ pour Rose Lake se fait par un temps gris et nuageux. Comme prévu au programme (bravo pour le guide) élans et caribous sont au rendez-vous. Ils sont toutefois trop loin pour être photographiés ou, quant ils sont proches, s’éloignent trop rapidement. Nous traversons une vaste zone marécageuse gelée et comprenons mieux que tout déplacement à pieds en été est impossible.



S’il est difficile d’approcher les caribous, nous pouvons en revanche apprécier leur nombre au vu des champs de neige qu’ils labourent afin d’y dénicher les lichens, base de leur alimentation. Seule la piste des traîneaux est restée intacte et on peut se demander par quel miracle ? Y-aurait-il un contrat entre les caribous et les mushers ?

La piste nous mène à travers des forêts d’épinettes calcinées dont il ne reste plus que les troncs dont l’écorce se détache en lambeaux. Même après quelques années, la plupart des troncs restent debout alors que la forêt se régénère naturellement par la pousse de jeunes pins, espèce invasive.


Rencontre insolite avec un piège à carcajou (ou glouton), suspendu à un arbre dans la mesure où la saison de trappe vient de s’achever.



C’est une magnifique mais très raide descente entre les épinettes qui nous conduit jusqu’au bord de Rose Lake où nous goûtons enfin un repos bien mérité. Plusieurs cabanes du gouvernement canadien constituent un véritable lieu de villégiature.







La première opération a consisté à chauffer tout ce volume ce qui était aisé du fait de la présence d’un énorme fourneau et d’une antique cuisinière à bois comme en avaient nos grands parents.




Par ailleurs, la cabane est dotée d’un véritable évier, toutefois inutilisable en cette saison. Des bouteilles de gaz propane alimentent un réchaud et, luxe suprême deux lampes fixées au plafond.






Le lieu a l’air très fréquenté. En été, il est notamment accessible en hydravion et un service relativement régulier semble être assuré. Le cahier de dessins de la cabane nous révèle des œuvres probablement révélatrices d’expériences ou de réflexions propres à ce lieu inhabituel : paysages, chevaux, souris, angoisses, champignons hallucinogènes …loups. Même les cornes d’élans servent de support à dessin.














En guise de dîner, Matthieu nous fait découvrir la viande d’élan, sous la forme de pavés succulents. Merci au collègue d’Icy Waters, généreux donateur de cette pièce de viande.

La nuit est mouvementée : les loups répondent aux chiens et les chiens répondent aux loups. Toute la vallée résonne de hurlements, à plusieurs reprises. A croire qu’ils ont des centaines !

4 commentaires:

Ephem buren a dit…

Approuvé et signé!

Tonton a dit…

Chapeau ! le reportage est captivant, bien écrit, les photos donnent envie, on a l'impression d'y être...D'ailleurs, il me semble entendre des hurlements de loups ...
Bien noté pour la neige jaune :-)

Anonyme a dit…

Meme au fin fond du Norfolk, je lis avec plaisir vos aventures!j' imagine les cracs du traineau s'eclatant contre le tronc, les hurlements angoissants des loups el les odeurs des bannocks chauds... Ici, perce neiges, crocus en fleurs, fish and chips bien graisseux et ales locales dans des pubs bien sympas...Bises d'outre manche. Momoduport

EB a dit…

SUUUUIIIITE, svp!!!